mardi, novembre 29, 2005

Change (in the house of flies)

Ouaï ! Je reprends mon blog de nos deux tentacules que j’avais laissé dépérir pour causes multiples dont je vous ferai grâce. Toujours est-il qu’un constat s’impose après ces mois passés sans post: je souffre toujours d’une misanthropie sévère et même si ma pratique religieuse m’a permis de sortir un peu la tête du trou (on dirait un monologue dans un groupe d’alcooliques anonymes) ma propension à haïr/rejeter moins vite l’autre est limitée.Mais surtout est conditionnée par mon état général ce qui comprend: fatigue, retard dans les cours, discussions que j’ai eu avec mes amis, haine de moi-même, niveau d’alcool dans le sang,etc. Tous ces facteurs étant variables selon l’heure et le jour.
En conclusion je dirai, que finalement, mes progrès sont sujets à un tel point d’incertitude que l’on peut les considérer comme quasi nuls. Donc les gens sont toujours cons pour moi et je ne les aime toujours pas mais le pire réside dans le fait que j’en fasse partie (des gens, pour ceux qui auraient loupé la subtilité de ma remarque).

Voilà pour l’intro qui contient tout de même une conclusion (cherchez l’erreur). Voilà donc un nouveau temps fort qui s’annonce : j’ai envie d’un break. Tout le monde s’en fout mais comme c’est mon blog je vous dis « Zut ! » Au risque de paraphraser le Comte Pacôme Hégésippe Adélard Ladislas de Champignac. En effet, non seulement je vais parler de moi dans ces pages, alors que je m’y étais refusé plus tôt dans ces mêmes pages et à l’unanimité avec moi-même, mais également de l’évolution rampante qui est en train de se passer en mon for intérieur. Pas tant involontaire que ça par ailleurs cette évolution.

Usé jusqu’à la corde, le Poncho baisse les bras, dépose les armes et repart dans sa grotte le temps de remâcher ses défaites, ses défauts, ses faux pas puis fonce à nouveau, la tête dans le guidon (autant au sens propre que figuré) pour se confronter aux forces vives et aux gens dont le monde regorge.
Une lassitude s’est emparée de moi, assez d’être rigolo pour me faire intégré, être « cool » [concept certainement inventé par des scientifiques sadiques pour savoir si le commun des mortels était vraiment prêt à se mortifier pour une utopie et une manière d’être montée de tout pièce, comme l’amour finalement (cf. la conception de celui-ci par Edouard Baer dans Mensonges et trahisons et plus si affinités…)].
Assez de confronter mes idées à des personnes d’aussi mauvaise foi que moi, assez de perdre mon temps sur les bancs de la fac à entendre des crétins imbus d’eux-mêmes et tirant leur seule légitimité de parole de leur accoutrement aussi ridicule que celui que j’arbore. Enfin assez de courir derrière le temps, les choses à faire, les échéances à assurer et les envies frustrées (voire les besoins).

Voilà c’est dit : maintenant je veux faire un break. Un nouveau luxe que nous, européens névrosés, obèses, dépensiers, alter quelque chose car il faut bien se convaincre que l’on ne suit pas le mainstream et pétris d’humanisme aux fêtes carillonnées, mis en avant dès que nous ouvrons la bouche pour parler du social –mot éculé s’il en est- histoire d’engouffrer notre foie gras tranquille; un nouveau luxe disais-je, que nous nous offrons allègrement sans même penser une nanoseconde que c’est tout sauf normal.
Par "normal" j’entends l’humanité dans son ensemble, l’homme à l’échelle empirique, dès lors les copains, qu’est-ce qu’on observe? Les japonais ne font pas les 35h, les bagdadiens n’ont pas de couvre-feu pour ce qui est des bombes et des perquisitions musclées, les israéliens n’ont que depuis peu des plages horaires où les transports en commun sont sûrs, les attentes interminables dans un bus à 47° pour les palestiniens ne sont pas des moments de repos et d’introspection nombriliste, le Timor oriental et la Corée du Nord ne croient toujours pas bon de faire un moratoire sur les persécutions arbitraires de la population et ne parlons de ces abrutis de dirigeants soudanais qui ne veulent pas dégager au moins un week-end par mois pendant lequel leurs administrés pourraient manger à leur faim (ce qui serait déjà énorme) alors que Marie-Claire, Men’s Health, Psychologie, Bien-être, J&J, etc. ne font qu’en parler. Enfin moi j’y crois, si tout le monde en parle en rameutant psychologues, psychanalystes, spécialistes du stress, deux trois chiffres sortis de derrière les fagots, des témoignages de lecteurs lambda qui compenseront par ce biais leur inexistence cathodique et enfin un preuve matérielle avec les photos avant/après d’une star qui en a fait un c’est ce que c’est forcément vrai et scientifiquement prouvé (si tant est que la science telle que Einstein la connaissait existe encore, cf. doctissimo pour une session « la médecine ramenée au ras des pâquerettes et vous »).

Sur ces considérations aussi foireuses que simplistes et réductrices je reprends: un break donc. C’est pas tant que je sois hyperactif mais en regardant bien je m’aperçois que mener une vie de patachon tout en essayant de se sortir les doigts deux fois par an ne peut être que le meilleur des résumés de ma vie universitaire même si le tout est ponctué de vrais rush avec des expériences vraiment intéressantes pour le coup. Je suis persuadé que ceux qui me liront (4 au minimum) n’auront pas refuser de se voir appliquer un constat similaire.

Voilà le mot est lâché. Je m’explique plus ou moins: malade jusqu’à la nausée des faits cités plus haut et dégoûté de voir tout ce précieux temps couler entre mes doigts comme de l’or en barre, ces bouquins devant lesquels je passe en sachant que je n’aurai jamais le courage de me dégager assez de temps pour en lire le quart comme une bibliothèque qui brûle me pousse à dire « hé ho gamin, ralentis tenace, arrête de sortir pour des raisons aussi peu enrichissantes que de l’uranium bon pour le rebus, cesse de faire ta moule sur ton fauteuil en regardant vaguement les murs et ouvre enfin un de ces putains de bouquins qui prennent la poussière, écoute la musique et arrête de ne la mettre que comme un fond sonore, ne force plus les gens à parler mais attends plutôt des rencontres assez espacées dans le temps pour pouvoir en venir à l’essentiel et se passer de tous les détails purement factuels de la vie de tous les jours que l’on cite en les assaisonnant d’autodérision ainsi que de grands gestes ».
Finis les rires forcés trahissant un désespoir ironique face à la vacuité de nos activités, de nos discussions, de notre soi-disant culture.

Que l’on arrête de se tripoter en s’interrogeant sur comment réformer l’Education nationale, sur notre incapacité structurelle à être meilleur ou du moins aussi bon que l’on s’imagine, si oui ou non c’est la bonne personne et comment agir, sur pourquoi Sarkozy est si méchant et comment introduire notre pensée de manière assez consensuelle, avec sa sempiternelle touche d’insolence calculée dans le prochain débat fait autour d’un pot ou au téléphone, arrêtons enfin de passer plus de temps à établir un plan de bataille pour être plus productif qu’à l’être concrètement.

Je propose une solution simple, je l’ai trouvé au bout de 7 ans de réflexion *pas peu fier*: forçons-nous à rester plus chez soi, agissons à chaque seconde, les moments de répit doivent se passer la nuit (pendant une partie du moins), la journée doit s’étendre de 8h30 à 1h30 environ, n’attendons plus la dernière minute pour faire une tâche qui nous les broute, faisons les avec entrain (histoire de pas trop bâcler) et même, avançons-nous régulièrement pour avoir la satisfaction et l’illusion que finalement il n’y a pas tant de contraintes que ça aujourd’hui enfin cessons de nous laisser vivre.

En gros voilà l’esprit de votre hôte en ce moment, je veux passer mes exams correctement cette fois-ci, j’entends par là ne pas tout ficher et apprendre en une semaine, lire plus, écouter plus de chose, m’enrichir des gens, de leur expérience, de leurs réflexions, en rencontrer de nouveaux pour recommencer bref faire ce que j’ai toujours voulu: être à l’écoute du monde, en faire partie, m’enivrer du flot incessant des rencontres, d’occasions à saisir et de choses à découvrir tout en gardant un certain recul critique ou un recul certain selon mes capacités conjoncturelles. C’est beaucoup plus simple à dire qu’à faire je vous l’accorde mais ça a quand même le mérite d’être formulé.

Enfin et surtout revoir l’océan, c’est en relisant les blogs de jouch (guitariste de l’excellent agora fidelio), narco et ceRf (chroniqueurs au Noisetimes et ami en ce qui concerne le dernier) que cette idée de maison en Bretagne m’est revenue à l’esprit.
Comme eux j’ai toujours eu l’image lyrique de celui qui se balade les embruns et le vent battant sa peau burinée par le soleil et le dur labeur, sentir s’enfoncer dans le sable encore humide, être hypnotisé par le ressac, être bercé par le fracas de la houle…
Je finirai en faisant observer aux trois éminentes personnes intéressées par la West Coast bretonne ou landaise -c’est selon ce que l’on connaît- comme il est amusant et énigmatique le parallèle à faire entre le magnétisme de la lune s’opérant sur l’océan et celui de ce dernier sur nous humbles personnes.

Je vous laisse quasi en paix d’avoir évoqué ces images qui iront me faire chavirer jusqu’en dans les bras de Morphée. Bien le bonsoir à vous tous.